À la base, je ne devais même pas te parler de ça.
À la base de la base, je voulais te raconter comment on confond littéralement les SDF avec le mobilier urbain.
Genre, t’as une personne assise dans un coin avec une pancarte à mendier mais tu ne la voit pas. Elle est fondue, littéralement, selon ton cerveau, avec l’immeuble contre lequel elle est adossée.
Autrement dit, les SDF ne sont pas considérés comme des personnes par ton cerveau.
Et, ce n’est pas moi qui l’affirme 💡
Ce sont les résultats de l’expérience de Lasana Harris et Susan Fiske.
Ils ont testé comment les gens perçoivent les membres d’un autre groupe au niveau neuronal.
Ainsi, t’as le cortex préfrontal médian (mPFC) qui s’active quand tu fais des choses qui impliquent de te connecter et tenir compte d’autres personnes.
Ce peut être reconnaître et distinguer les visages et faire preuve d’empathie par exemple.
Après, ils ont voulu pousser l’expérience.
Est-il possible que des gens ne perçoivent pas d’autres gens comme des êtres humains mais, comme des objets ? 🏺
Notamment des SDF.
Là, bingo.
C’est exactement ce qu’ils ont trouvé.
Ils ont pris plein de groupes de personnes et, le cortex préfrontal médian s’est activé pour tous à l’exception d’un groupe. Je te le donne en mille :
Les SDF.
Par conséquent, cela suggère que les sans-abri ne sont pas reconnus comme humains par rapport aux autres groupes. Ils sont en fait perçus, du moins dans cette zone du cerveau, plus comme des objets, tels que des tableaux 🖼️
Pourquoi ça fait ça ?
En fait, 95% de notre attitude à l’égard des autres est déterminé selon deux indicateurs qu’on perçoit de l’autre : son amabilité et, son intelligence.
Ce faisant, l’amabilité perçue d’une personne déclenche chez nous de la sympathie et, l’intelligence perçue, du respect.
Maintenant, tu as tout pour les calculs.
En effet, si on ne considère pas les SDF comme des êtres humains, c’est qu’on ne les perçoit ni comme aimables ni comme intelligents.
Or, ces deux dimensions sont cruciales pour ce qui nous rend humains ou plutôt perçus comme tels.
Car oui, ça, c’est la deuxième claque 👋
L’intelligence et l’amabilité que tu dégages (et non réelles) fait qu’on te perçoit plus ou moins comme humain. Notamment car, cela déclenche de la sympathie et du respect chez les autres.
Les SDF ne font pas ça chez nous.
Notamment au niveau neuronal.
Ainsi, perçus comme des objets, ils sont vidés de toute substance humaine et finissent déshumanisés.
Ceci posé, je me suis alors demandé :
Et si un processus similaire avait lieu avec les femmes ?
Oui.
On parle souvent du concept de femme-objet.
C’est même rentré dans le dictionnaire 📕
Alors, à l’instar des SDF, est-ce que la raison pour laquelle les femmes sont déshumanisées se trouve aussi dans notre cerveau ?
Réponse.
Suspens. Suspens ^^
Oui et non.
En fait, c’est plutôt OUI et oui.
Soit un grand OUI et un petit oui.
Pourquoi ?
Parce que non seulement, le phénomène que je t’ai décrit à l’instant explique pourquoi on traite les femmes comme des objets mais …
… ce n’est pas le seul 💡
Il en existe également un autre.
Ce dernier est (plutôt) complémentaire au premier.
Alors, commençons par le petit “oui”
Les femmes sont réduites à leurs attributs sexuels
C’est un biais de notre reconnaissance visuelle.
En effet, Sarah Gervais, Theresa Vescio, Jens Forster Anne Maass et Caterina Suitner se sont aperçus qu’on traite les images d’hommes de manière différentes à celle des femmes.
Lorsqu’on présente des images d’hommes, les gens ont tendance à traiter l’image dans sa globalité. Ainsi, les hommes sont regardés dans leur ensemble.
À l’inverse, quand il s’agit de femmes, celles-ci ont un traitement local. Autrement dit, on les regarde en particulier à travers leurs attributs sexuels.
Le plus “marrant” là-dedans ? 😶
Ce biais s’opère aussi bien chez les hommes que les femmes.
Les femmes réduisent aussi les autres femmes à leur attributs sexuels.
Or, y a problème.
En principe, le traitement global devrait nous en empêcher lorsqu'il s'agit de personnes.
En effet, le traitement local est censé être réservé aux objets quand le traitement global aux personnes.
Sauf que ça ne marche pas 🤷
Pourquoi ?
Aucune explication sinon que c’est un biais.
Soit, un raccourci mental, qui, s’il peut être contrecarré par de la réflexion, demeure la manière intuitive du cerveau de faire.
Mais ça, je t’en dirai davantage beaucoup plus bas 👇
En attendant, tu retiens :
On traite les femmes comme des objets, car on les voit comme tels.
Maintenant, passons au grand OUI.
Les femmes ne sont pas perçues comme intelligentes et aimables.
Je te rappelle rapidement le principe :
L’intelligence et l’amabilité que tu dégages (et non réelles) fait qu’on te perçoit plus ou moins comme humain. Notamment car, cela déclenche de la sympathie et du respect chez les autres.
Or, il s’avère aussi bien les hommes que les femmes, perçoivent les “femmes sexualisées” comme des personnes dépourvues d’intelligence et d’amabilité.
En réalité, je devrais dire de “moralité”.
Mais Lasana Harris et Susan Fiske ont inclus ce trait dans l’amabilité.
Or, qu’est-ce qui se passe quand on ne perçoit par quelqu’un ou un groupe de personnes ni comme aimables ni comme intelligentes ?
Comme pour les SDF, on les traite comme des objets.
Autrement dit, on les déshumanise.
Ici, on a enfin une réponse à la question :
Pourquoi traite on les femmes comme des objets ?
C’est au niveau du cerveau 🧠
On ne les voit pas dans leur ensemble comme des personnes car, on les réduit à leurs attributs comme des objets.
Or, quand une femme est sexualisée, on la pense sans intelligence et amabilité. Dès lors, on les prive de respect et de sympathie, ce qui déclenche un processus de déshumanisation.
Oui, quoique tu fasses, quand t’es une femme, ça devient difficile de s’en sortir ^^’
Voilà.
Mais avoue : ce n’est pas satisfaisant 😕
Car, j’ai beau expliqué le phénomène d’objectivation, cela ne le rend pas davantage acceptable.
D’ailleurs, ne te méprends pas sur mes intentions :
IL EST INACCEPTABLE DE TRAITER DES ÊTRES HUMAINS COMME DES OBJETS.
Que ce soit des SDF ou des femmes ou tout autre catégorie de personnes.
Car, je ne t’ai pas dit, mais ce phénomène s’applique également dans le racisme, les génocides, et j’en passe.
Le fait de ne pas voir les autres comme des personnes mais comme des objets permet de ne pas se sentir coupable du mal que l’on leur fait.
Pour ça qu’on insulte les gens également 💢
On détériore l’image qu’on a d’eux, même intérieurement, les retenant à l’état d’objet pour justifier sereinement le mal que l’on pourrait leur faire. Après tout, blesser un abribus ce n’est pas blesser un être humain.
Puis, surtout ! cette explication a le don de permettre une excuse pour disqualifier sa responsabilité. Bah oui ! tu peux dire :
Je vois les femmes comme des objets mais, c’est pas faute ! c’est mon cerveau. Il est comme ça. J’y peux rien.
Or, ce n’est pas vrai.
Si on est le jouet de nos biais - car oui ! les phénomènes que je t’ai décrit sont bien des biais - on dispose d’un pouvoir terriblement puissant sur notre cerveau 🧠
C’est même grâce à ça qu’il n’échappe pas à ton contrôle et que tu ne finis pas marionnette de ses caprices.
Ce pouvoir, roulement de tambour tatatatatata, c’est :
RÉFLÉCHIR.
Je sais, assez décevant comme révélation ^^
Il n’empêche, c’est puissant.
Tu veux une autre révélation ?
Ton cerveau est même conçu pour t’éviter de le faire.
Et inutile de faire “non non” de la tête 🙉
C’est la réalité.
Ton cerveau remplit tellement de fonctions comme te déplacer sans tomber, voir, respirer etc … qu’il consacre la majeure partie de son énergie à ça : te maintenir en santé.
Alors, réfléchir est le cadet de ses soucis et par conséquent, il ne le fait pas automatiquement. Il a besoin que tu le forces à le faire.
Daniel Kahneman parle de mode réflexif en opposition au mode intuitif.
Sachant que le mode intuitif est le terrain sur lequel prospèrent tous les biais.
Ah mais j’y pense ! je ne t’ai pas fait les présentations ^^
Daniel Kahneman, c’est le seul psychologue à avoir eu un prix d'économie. Ça te pose le niveau du mec. Il a écrit un excellent bouquin sur le sujet : Système 1 🐇 / Système 2 🐢 : Les deux vitesses de la pensée.
En définitive, si tu tiens à réhumaniser les gens, tu vas devoir mettre de la réflexion entre toi et les gens.
Simple et accessible, comme remède.
Et, si tu te demandes c’est quoi réfléchir ?
Voici une définition :
C’est la faculté qu’a la pensée de faire retour sur elle-même. Voire de penser contre soi.
Autrement dit, tu prends ta pensée réflexe qui vient avec ton biais puis, demande-toi SINCÈREMENT pourquoi tu penses ce que tu penses ?
Faudrait un livre entier pour expliquer ça.
Mais là, je n’ai ni la place, ni le temps ⏳
Ce sera pour une autre fois :)
Je sais ! ça ne se fait pas de teaser sans creuser.
Surtout quand cela peut supprimer nos biais déshumanisants.
Alors, je te laisse avec le philosophe franco-lituanien Levinas.
Il a peut être une autre solution.
Cela consiste à regarder le visage des gens.
Pas regarder dans les yeux 👀
Juste le visage.
Car, selon lui, il y a, dans le visage de l’autre, un attrait éthique qui nous pousse à bien agir envers lui ou elle. Après tout, y a bien des agresseurs qui refusent de voir le visage de leurs victimes, non ?
Voilà.
C’était La Claque du jour :)
Je comptais finir sur une note positive mais, je n’ai pas trouver d’image plus légère. Après, peut être le sujet est trop délicat pour les blagues. Ou peut être, je suis juste nul en blague.
J’en sais rien ^^
S’il fallait retenir une chose, c’est que la déshumanisation est un phénomène issu de nos biais qui tient essentiellement à une double perception : l’intelligence et l’amabilité.
Ces dernières sont la condition pour notre respect et notre sympathie et au final, considérer l’autre comme un être humain 👩
Alors, que penses-tu de tout cela ? :)
Tu le savais ?
T’es là par curiosité ou on t’a partagé cet article ? Toi aussi, inscris-toi et rejoins +300 claqueurs avec une claque intellectuelle par jour directement dans ta boîte email ✉️